En 2022, la chanson et la poésie sont au cœur des révoltes et des contestations dans de nombreux pays qui subissent invasion militaire ou dictatures. Petit tour d’horizon : "Baraye" en Iran, "Le Déserteur" de Boris Vian en Russie, louzi tchervona kalyna (Hey Hey rise up) en Ukraine
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Poème publié dans le n° 106 (avril 2022) de la revue Poésie Sur Seine sur le thème "Les fleurs":
Je marche dans la rue.
Une fleur me dit : « Bonjour ! »
Je passe,
Je m’arrête,
Me retourne,
« Bonjour ! »
Elle est là
Sur le mur,
Un vieux mur de pierres,
Esseulée dans la ville.
« Qui es-tu ? »
« Tu ne me reconnais pas ?
Je suis la fleur,
La fleur perdue,
Oubliée,
Jetée dans les poubelles d’un romantisme que l’on dit désuet,
Assassinée au nom de la productivité,
Éradiquée des champs,
Supprimée des pavés.
J’ai du migrer,
M’exiler.
Je me suis accrochée sur les pierres du vieux mur,
Tant qu’elles sont là (le béton avance qui ne m’aime pas).
Les abeilles ont disparu,
Mes amantes ne sont plus.
Je suis la fleur,
La fleur perdue.
Je suis une couleur,
Me transforme en parfum.
Je viens hanter vos rêves
De raisons raisonnées.
A peine fleurie,
Déjà perdue,
Je renaîtrai demain,
Si bitume et béton
Ne m’ont pas délogé.
Reine de l’éphémère,
Je parfume vos vies.
Je suis la fleur sauvage
Qui pousse sur le pavé,
La fleur des champs assassinée
Par des mécaniques aveuglées.
Pesticidée, herbicidée, fongicidée,
L’abeille est ma compagne
Bientôt asphyxiée.
Je suis la fleur,
Ta fleur.
Fleur de cœur !
La fleur de Béranger,
Le coquelicot de Manet,
L’aubépine d’Hugo,
La fleur traquée
Qui hante vos sommeils informatisés
Au rythme de vos algorithmes,
Vos cervelles sucées,
Vos neurones rongés.
Je suis la survivante
D’un monde oublié,
La fleur sauvage,
La fleur du pavé,
La fleur des champs pulvérisée,
La fleur qui est l’œil
Qui regarde dans les tombes de nos vies résignées.
Au revoir ! »
« Au revoir ! »
Je lui souris,
Fais un signe de la main,
Timide,
Et reprend mon chemin,
Les mains derrière le dos,
Le front penché,
Triste !
Antoine Leprette
Jeudi 30 décembre 2021
La maison du Pêcheur – Locmiquélic
Je marchais dans la colline,
Inondé de lumière et du bleu de la mer.
Sur un rocher, un grand oiseau blanc m’attendait.
Il me dit :
« Vole !
Ai confiance !
Tu peux vivre maintenant. »
Sur les rives d’un grand lac,
J’ai vu un cygne bleu au long cou si gracieux.
S’inclinant devant moi,
Il me dit :
« Apprivoise ta solitude !
Il va te falloir l’aimer pour deux. »
Continuant mon chemin, j’ai croisé un grand paon.
Sa queue faisait la roue.
Saluant mon passage,
Il me dit :
« Tu as construit une maison
Tu as arpenté bien des chemins
Tu as nagé dans le lac des souvenirs anciens
Tu as rêvé tout haut d’impossibles futurs
Tu as aimé, ô combien !
Et ton amour s’est envolé sur un oiseau d’argent.
Il est temps maintenant !
Plonge tes mains dans la glaise
Façonne ton présent »
Alors !
Alors, j’ai ouvert les bras
Et comme un enfant ivre de soleil et de vent
Je me suis mis à courir,
A courir en chantant
« La la la laaa,
La la la laaa,
Laaa »
(La sol fa mi
Sol fa mi ré
Mi)
Antoine leprette
Mercredi 2 mars 2022 L’Appart’ de la colline
Marseille
«Après le départ d’Isa» (en préparation)
A nos amis Ukrainiens, Syriens, Yéménites...
Nous crions dans l’orage
Nous hurlons dans le ciel bleu
Devenu gris
Devenu noir
Tourmenté
Ils sont revenus
On les croyait finis
Il n’en n’ont jamais assez
Ils sont revenus les buveurs de sang
De notre sang
On les croyait d’un autre Temps
Ils sont de tous les Temps
Les suceurs de sang
Avec leurs tristes jouets morbides
Leurs tanks, leurs avions et leurs bombes
Leurs grands mots et leurs mensonges
La haine au ventre
La haine au cœur
La haine aux yeux
La haine de la vie
Ils n’aiment que la mort
Jamais la leur
Celle des autres
Les Autres
Les Pas pareils
Les Pas comme eux
Les différents
Ils n’aiment pas la vie
La vie leur fait peur
Nous crions dans l’orage
Nous hurlons dans le ciel bleu
Devenu gris
Devenu noir
Sinistré
Mais nous continuons
Oui nous continuerons
Encore et toujours
Partout et en tous lieux
A crier ton nom
« Liberté »
Foutez nous la paix !
Antoine Leprette
Lundi 21 mars 2022 - La maison du Pêcheur – Locmiquélic dans « Blues du soir (en préparation)
Encore et encore merci à Eugène Ionesco pour avoir écrit « Rhinocéros »
Chemises noires
Chemises brunes
Les vautours sont de retour
Tapis dans la nuit
Aux aguets
Prêts à tout
Pour béqueter les charognes
L’air putride de nos faiblesses
Au soleil
Paillettes et blonds cheveux
Mais dans la nuit
Dents acérées
Chemises brunes
Chemises noires
Tissées de mensonges et de haine
Décolorées par la peur
La peur de l’autre,
De la vie
Les rhinocéros sont dans la ville
Un, puis deux, puis mille
Ils sont maintenant des millions
Leurs troupeaux se répandent
Dans les bureaux
A la radio
Puissions nous tous ensemble crier :
« Ce n’est pourtant pas si vilain que ça un homme..
(…)
On ne m’aura pas, moi
Vous ne m’aurez pas, moi
Je ne vous suivrai pas,
Je ne vous comprends pas !
Je reste ce que je suis.
Je suis un être humain.
Un être humain.
(...)
Contre tout le monde,
Je me défendrai !
Je suis le dernier homme,
Je le resterai jusqu’au bout !
Je ne capitule pas !»
Antoine Leprette
Jeudi 15 avril 2022 - La maison du Pêcheur – Locmiquélic - dans «Blues du soir» (en préparation)